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Divination et Rhétorique

Atelier de recherche mensuel organisé par Danouta Liberski (CNRS), Odile Journet-Diallo (EPHE) et Stéphan Dugast (IRD)

Périodicité  : 3e jeudis du mois ;
Localisation  : IMAF-Ivry, CNRS, 27, rue Paul Bert 94204 Ivry-sur-Seine cedex ;

Programme

 20 novembre 2014, 14h à 16h, site Ivry
Danouta Liberski : Orientation, Inventaire, Perspectives
Stéphan Dugast : Consultation de l’oracle après une noyade (pays Bassar, Togo)

Présentation

La très grande diversité des formes africaines de consultation de l’oracle offre à l’entreprise comparative un champ d’exercice qui a été peu exploité jusqu’à aujourd’hui. A l’exception notable des systèmes géomantiques (proprement dits et dérivés) que l’on retrouve en maintes régions du continent, de l’Atlantique à l’Océan Indien, et qui, en raison même de cette large diffusion et de leur apparentement technique avec la géomancie arabe, ont tiré l’œil du comparatiste, les autres formes de l’art divinatoire ont le plus souvent été abordées telles des monades techniques, en relation avec les différents aspects de la société où elles sont pratiquées. Les grilles de lecture de ces divinations africaines ont sensiblement évoluées depuis le regard ostracisant des missionnaires chrétiens et des scientistes, les uns et les autres se rejoignant dans le rejet de la divination du côté de l’irrationnel, la charlatanerie et la manipulation de la crédulité des « ignorants » (condamnation qui est, au demeurant, également partagée par le Coran). Appréhendés, à la suite de Marcel Mauss, comme le lieu d’exercice par excellence des catégories qu’une société met en œuvre pour penser l’événement, et plus avant, comme de véritables « machines à penser » le malheur et la maladie, les systèmes divinatoires africains ont fait l’objet dans les années 60-85 de très nombreux travaux, notamment dans le champs de l’anthropologie de la maladie. A ceux ci s’ajoutent quelques textes, aussi rares que précieux, consacrés à la description et l’analyse formelle d’un système divinatoire particulier (B. Maupoil, R. Jaulin, A. De Surgy, A. Adler et A. Zempleni, M. Cartry, E. Mendosa). Cette littérature abondante, quoique dispersée, à laquelle s’ajouteront les données propres des participants à l’Atelier forme une base solide à l’entreprise comparative. Un premier travail de recensement raisonné de cette littérature diffuse devrait être menée dans le cadre de l’Atelier. 


Dans le sillon ouvert par les travaux de Michel Cartry sur la divination, nous proposons de centrer les premiers questionnements de l’atelier sur les usages de la parole dans le cadre d’une consultation divinatoire. La littérature ethnographique consacrée aux populations voltaïques fournit maintes exemples de divination qui ne sont pas seulement différentes par les modalités techniques utilisées pour interroger le sort, mais qui présentent une extrême diversité dans les manières de conduire l’interrogatoire, ainsi que dans les procédures rituelles et rhétoriques suivies pour exprimer les questions posées à l’oracle. Le registre de la voix sollicité (voix de tête du devin ventriloque ou en transe, voix retenue du géomancien, voix chantonnée du devin au bâton, etc.), l’existence ou non d’un formulaire dans lequel devin et client coulent leurs questions, le mode sur lequel le consultant expose sa question (en certaines divination par le bâton, le client ne peut en aucun cas dire ce qui l’a amené à consulter, ses questions doivent rester muettes), sont autant d’éléments de la « rhétorique du dire oraculaire » qui varient d’un système à un autre, qui sont l’objet de choix distincts. Peut-on mettre en évidence des concomitances dans ces usages différents de la parole en fonction des techniques divinatoires employées ? Tel pourrait être l’une des questions autour de laquelle s’organiseraient les interventions de la première année de l’Atelier.

Lors des discussions préparatoires, les responsables de l’atelier ont présenté les grandes orientations qu’ils souhaitent lui donner. Après avoir rappelé qu’il s’agit d’un d’un travail de réflexion sur la longue durée où chaque participant apporte en partage des matériaux, des intuitions ou des réflexions pour une construction commune, il a été décidé d’ouvrir deux grands chantiers : 

1. Un inventaire raisonné des différentes formes de divination répertoriées en Afrique. Le but n’est pas ici l’exhaustivité, mais la représentativité ou la singularité d’une forme ou d’une autre. Il s’agit moins de dresser une typologie que d’interroger et de comparer les sources existantes, de voir aussi si l’on peut repérer des régularités, des récurrences et établir une première grille d’analyse de ces systèmes. 

2. Une présentation des matériaux de chacun, avec les questionnements qui en ressortent, et, en parallèle ou en alternance, des lectures critiques de textes classiques et moins classiques sur la question de la divination (en Afrique ou ailleurs).

Site de l’atelier : ardi-cemaf.fr (en cours de migration). Ce site offre une bibliographie, des photographies, des articles publiés. Vous pouvez y collaborer en envoyant des références par mail à addenicolas@gmail.com.