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Le temps des esprits. Ce que la sorcellerie fait à l’histoire (et vice-versa)

Les conférences se dérouleront de 10h à 12h, à la Fondation Maison des sciences de l’homme (FMSH), 54 bd Raspail, 75006 Paris.
Les salles sont indiquées ci-dessous, dans le calendrier des conférences.

Andrea Ceriana Mayneri, chargé de recherche au CNRS (IMAF).


Présentation :

Je présente un cycle de six conférences autour de différentes expériences du temps en Afrique centrale et de la manière dont elles se donnent à voir à travers des faits sociaux et religieux, liés notamment à la sorcellerie. Les exposés suivent le mouvement de mes propres recherches en Centrafrique et, dans une moindre mesure, au Tchad, ainsi que dans des archives et autour de musées.

En Centrafrique, le schéma sorcellaire qui impute les malheurs individuels et collectifs à un autre proche et persécuteur est très prégnant dans l’espace privé et familial comme dans celui public. Il s’exprime à travers un imaginaire complexe, possédant lui-même son historicité, peuplé de figures de l’attaque et de la riposte ; il donne lieu à des stigmatisations et à d’autres violences ordinaires qui peuvent aller facilement jusqu’à la torture, à la mise à mort ou à des peines d’emprisonnement.

J’assume que ce schéma d’interprétation et d’action participe d’une théorie des pouvoirs en présence (M. Augé 1975), chevauchant la frontière entre le visible et l’invisible : cette théorie, n’admet pas seulement qu’un même pouvoir puisse être utilisé pour nuire ou, au contraire, de manière socialement positive, mais postule aussi que cette variation puisse se produire dans le temps. La sorcellerie qui hante le présent est souvent décrite comme un usage dérouté et perverti d’un pouvoir plus ancien dont, dit-on, on faisait autrefois une utilisation plus constructive. Le présent et ses maux sont ainsi mis en perspective et « la sorcellerie » est un opérateur fondamental de cette herméneutique du changement social qui réinvente continuellement le passé.

L’analyse critique de matériaux d’archives viendra épaissir les exposés en investiguant la fabrique coloniale de la sorcellerie équatoriale. Je m’efforcerai de mettre en lumière les transformations qui affectent, depuis plus d’un siècle, les figures de l’imaginaire local de l’invisible, du religieux et du pouvoir, ainsi que les conditions socio-historiques et la logique de leur resignification au prisme de la menace sorcellaire.

L’imaginaire de la dépossession, de la perversion et des errances du pouvoir exprime, y compris par la violence, une expérience du temps qui, en ambitionnant un autre futur, reconstruit dans le présent un passé parmi d’autres. Depuis plus d’un siècle, dans cet espace humain et géographique marqué par de multiples conflits, l’expérience de cette discontinuité croise d’autres représentations : par exemple les conceptions utilitaristes, portées essentiellement par des acteurs étrangers, qui prônent les effets thaumaturgiques du passé et l’édification de communautés de mémoire pour soigner les fractures du présent. Derrière ces expériences du temps divergentes, l’usage de la mémoire et l’écriture du passé sont des enjeux que les acteurs religieux et politiques ne manquent pas de s’approprier.

Les conférences proposées traiteront de ces thèmes et s’efforceront de les situer au sein d’une ample interrogation sur les métamorphoses du passé dans le présent à partir du tumultueux espace centrafricain. L’expérience du temps et la place de la mémoire se détachent comme deux thèmes qui traversent le cycle des exposés.

En savoir plus

le_temps_des_esprits_programme


Conférences :

 Jeudi 7 avril 2022 (salle 21)
Sorcellerie, histoire, anthropologie

 Jeudi 14 avril (salle 33)
Archives, missions

 Jeudi 21 avril (salle 21)
Prophétismes, iconoclasmes

 Jeudi 12 mai (salle 33)
Transe, abus

 Jeudi 19 mai (salle 21)
Justice, punitions

 Mercredi 25 mai (salle 15)
Musées, palimpsestes


CONTACT :
afrinauta@gmail.com