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Anthropologie comparative du Sahel occidental musulman (Sénégal, Mauritanie, Mali...)

Séance du 9 février 2022, de 16h30 à 18h30
Bâtiment EHESS du Campus Condorcet, salle 25-B, 2 Cours des Humanités, 93300 Aubervilliers


 Catherine Taine-Cheikh
(cath.tainecheikh@gmail.com), directrice de recherche émérite au CNRS (Lacito - CNRS, Université Sorbonne Nouvelle et Inalco)
Langues et hiérarchie sociale. La subalternité en ḥassāniyya (Mauritanie)

Résumé :
Lorsque Faidherbe, en 1854, veut donner une idée des Maures, il fait remarquer que ce nom, devenu un nom de peuple avec les Romains, a été donné à des populations différentes – mais toujours “de race blanche” – et précise à propos de ceux qui peuplent le Sénégal qu’il s’agit de “peuplades errantes et misérables, amalgame inextricable d’Arabes et de Berbères [...]”. Il ajoute : “si nous voulons savoir ce qu’ils sont, voyons quelles sont les langues qu’ils parlent. Or, ils parlent deux langues entièrement différents, qu’ils appellent klam el arab et klam ezzenaga, l’arabe et le zénaga.” (‘Les Berbères et les Arabes des bords du Sénégal’, Bull. de la société de géographie 7, février 1854, pp. 90 et 92).

S’il commence par évoquer le critère racial, Faidherbe (auteur de la première étude sur le zénaga, publiée en 1877) met malgré tout en avant la question des langues.

Je me propose de suivre cette piste en montrant que si la place de la langue arabe officielle tend à envenimer les rapports intercommunautaires en Mauritanie, celle du dialecte arabe parlé par les Maures, le ḥassāniyya, a joué et joue encore un rôle déterminant, tant au plan linguistique (dans la rétraction du zénaga) qu’au plan socioculturel (dans la constitution d’une communauté hassanophone).

Dans un second temps, il s’agira de se pencher sur les rapports de force internes à la communauté des Maures (ou Bīđ̣ân ‘Blancs’) et d’analyser les mots de la langue par lesquels les ḥṛāṭîn se nomment et sont nommés. On verra en quoi les nominations et leurs variations selon le genre, le contexte social et les régions, peuvent être éclairantes.


Références bibliographiques :

 Taine-Cheikh, C. (1988-1998), Dictionnaire hassaniyya-français, vol. 1 à 8, Paris : Geuthner, CIII + 1712 pp.

 (1989), "La Mauritanie en noir et blanc. Petite promenade linguistique en hassaniyya", Revue du Monde Musulman et de la Méditerranée, n° 54, 1989 / 4 [Mauritanie entre arabité et africanité, présenté et coordonné par P. R. Baduel], pp. 90-105.

 (2008), Dictionnaire zénaga-français. Le berbère de Mauritanie présenté par racines dans une perspective comparative, Berber Studies n° 20, Köln : Köppe, XCIX + 649 p.

 (2020), "« Hartani » : une enquête au pays des mots", L’Ouest saharien. Cahiers d’études pluridisciplinaires n° 10-11 (Devenir visibles dans le sillage de l’esclavage : la question ḥarāṭīn en Mauritanie et au Maroc, dir. par E. Ann McDougal), pp. 73-94.


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